J’ai (enfin) pris le temps de lire le livre de John Hattie, Visible Learning: a synthesis of over 800 meta-analyses relating to achievement (paru en 2009), disponible à la bibliothèque du Cégep. Le livre est une synthèse de plus de 800 méta-analyses portant sur la réussite scolaire. Le portrait est global, appuyé et met le doigt sur la profession enseignante et le système scolaire avec une objectivité étonnante et parfois même déconcertante.
Le regard posé est systématique. Hattie invite les intervenants en éducation à recueillir des données sur leurs façons de faire, puis à se demander : qu’est-ce qui fonctionne le mieux, pourquoi ça fonctionne, pour qui ça ne fonctionne pas?
Des dizaines de graphiques, à la manière de baromètres, permettent de jeter un regard sur différents effets analysés dans des études portant sur l’éducation.
Un regard sur l’apprentissage
Il cite Olson (2003) qui propose l’idée que se sont les étudiants qui décideront ce qu’ils voudront bien apprendre, indiquant du même souffle: « this does not mean we need to attend to individualized instruction but that we need to be aware of progression of knowledge and understanding for each student – and how they learn by themselves, learn with others, ans learn with adults (p.241) ». Il ajoute qu’il importe de tenir compte de la « culture » de l’étudiant citant une étude Nuthall (2005) qui affirmait que les étudiants savaient déjà 40% de ce qui leur était enseigné. Plusieurs études démontraient d’ailleurs que les étudiants connaissaient si bien leur « métier d’étudiant » qu’ils savaient démontrer qu’ils étaient occupés (pas engagés) et que leurs enseignants confondaient parfois les critères servant à définir une gestion de classe réussie et apprentissage réussi.
Le rôle de l’enseignant
Le regroupement de quelques recherches a permis à Hattie de conclure que l’enseignant tenant le rôle de facilitateur a une portée nettement inférieure au rôle d’activateur. L’enseignement réciproque, la rétroaction et l’aide à l’auto-verbalisation chez l’étudiant auraient un effet plus grand que l’apprentissage par problème ou par enquête par exemple.
Ce n’est toutefois pas un livre qui fournit des recettes, les nuances apportées sont très nombreuses et Hattie affirme, à l’instar de Fullan :
It is not a particular method, nor a particular script, that makes the difference; it is attending to personalizing the learning, getting greater precision about how students are progressing in this learning, and ensuring professional learning of the teachers about how and when to provide different or more effective strategies for teaching and learning. (p. 245)
À ce sujet, il fait écho au « backward design » en éducation, un design pédagogique qui commence par la fin: on réfléchit (et communique à l’étudiant) les résultats escomptés, puis on réfléchit à la preuve de l’apprentissage demandée (performances) et enfin on choisit les méthodes (enseignement et apprentissage) nécessaires pour y arriver.
L’innovation en éducation
Selon Hattie, les enseignants sont majoritairement prêts à adopter l’innovation, à cesser de faire ce qu’ils font comme ils le font que ce soit pour améliorer des façons de faire ou pour essayer quelque chose de nouveau. Par contre, il note que les changements sont nombreux en éducation, et que les innovations sont trop rarement mises en place sans fondements scientifiques (et parfois seulement parce qu’elles sont acceptées des intervenants).
Ce sont ces actions basées sur des faits qu’insiste l’auteur, comparant l’approche de ce que pourrait être l’éducation à ce qui est vécu en médecine. Une réflexion intéressante qui est se poursuit dans Visible learning for teachers : maximizing impact on learning, un livre du même auteur paru en 2012.
Cet article a d’abord été publié dans un blogue pédagogique dédié à l’intégration des technologies au Cégep Limoilou.